Ce clan du Néon qui éteint les lumières de la ville

Par le 6 mai 2008

Pas d’artifices. Quatre jeunes simplement vêtus, rassemblés place de la Comédie à Montpellier, à 21 h 30. Ils ne se cachent pas, au contraire. Même si certains vigiles ont été un peu agressifs.

178_low.jpg

Ils ont déjà croisé la Bac (brigade anticriminalité). Mais « ils ont vu le
tract et ils nous ont laissé faire. Les flics ne savent pas comment réagir à ça. Il n’y a pas de législation »
, explique Aurélie. Sur les tracts, le clan du Néon explique sa démarche : « Nous effectuons l’extinction de toutes les enseignes publicitaires ou des vitrines qui n’ont pas une utilité nocturne indispensable. » Le groupe de Montpellier se prépare. Seule une partie de la bande est présente, ce soir-là. Période d’examens oblige. Ils sont tous étudiants à la fac de sciences. D’habitude, ils y vont à une dizaine mais, même à effectif réduit, la motivation anime les rangs.

343_low.jpg

On devine un cintre qui dépasse du sac d’Aurélie. On imagine comment elle va s’en servir. Marie accourt, manche à balai sous le bras. Aurélie commence à détendre son cintre. Pour Florian, c’est le baptême du feu et quelques doutes l’habitent : « Beaucoup de gens disent que cela ne sert à rien. Mais cela devrait être un réflexe. Je ne vois pas pourquoi les commerçants ne pourraient pas le faire. » Et d’ajouter : « Pour moi, c’est pas une action qui va régler le problème mais, au moins, cela fera réagir les passants. » Pour une autre, éteindre des néons la nuit, « il faut l’avouer, c’est avant tout pour se faire plaisir. Au début, c’est les grosses crises de joie, l’euphorie. Maintenant, c’est plus anodin ».

« On demande aux patrons des magasins d’éteindre les lumières »

Trêve de blabla. C’est parti. Marie s’élance avec ses camarades dans la rue de la Loge. Collage intensif de tracts sur les vitrines des magasins. Les grilles ne l’arrêtent pas, elle passe les mains à travers. Perplexe, Moussa, un agent d’entretien, s’approche d’elle, interrogateur. « On demande aux patrons des magasins d’éteindre les lumières », éclaircit Aurélie. Ni une ni deux, Moussa s’enthousiasme. « C’est une bonne idée. Ça fait trop de pub. Et on gaspille trop d’électricité. Ça sert à rien du tout. »

442_low.jpg

Bonne surprise, beaucoup de néons demeurent éteints. Ce qui n’était pas le cas lors de la dernière mission du clan, une semaine auparavant. Comme quoi l’action porte ses fruits. « On a trop géré », s’exclame Géry. Satisfaite, mais pas complètement, Aurélie peste : « Le pire, c’est les télés allumées toute la nuit derrière les vitrines. » Direction une enseigne de vêtements déjà repérée. « Là-bas, c’est toujours allumé. » Bingo ! Florian s’invente chimpanzé. Il escalade la façade de l’immeuble de façon impressionnante. Et hop, en deux temps trois mouvements, interrupteur atteint et lumière éteinte. On souhaiterait presque que d’avantage de néons restent allumés pour revoir encore et encore la scène. Passent par là, Laurence et Christophe, des vacanciers venus de Dijon. Tract en main, Christophe s’exclame : « Ah oui, j’avais déjà vu ça à la télé. C’est parfait ! Ils ont raison. C’est mieux pour profiter des autres lumières de la ville. »

178_low.jpg

Direction le Polygone. Il passe à la casserole toutes les semaines. À gauche de l’entrée, les interrupteurs trônent. Courte échelle et magie, toute la façade s’éteint. En cascade. Cris de hourra. C’est vrai que la scène fait plaisir, fait briller les yeux. « Continuez, c’est une excellente idée », lâche une bande de jeunes. D’autres s’interrogent : « Comment t’as fait ? Ah, c’est aussi simple ! C’est super ! » Ou encore : « Tu vois, y en a qui réfléchissent. C’est encourageant. » Le meilleur pour la fin : le Corum. Et mince, un vigile. « On va galérer. » Sans une once de timidité, les jeunes s’approchent. Gentiment, le vigile insiste : « S’il vous plaît, attendez que je sois parti. Sinon je vais devoir prendre une perche pour rallumer. » Georges Frêche serait passé, un soir, devant le Corum. Mécontent, il aurait ordonné de veiller à ce que le palais des congrès reste éclairé.

Catégorie(s) :

Vous avez aimé cet article ? Partagez-le !

à propos de l'auteur

Auteur : Audrey Montilly

Diplômée de l’IUT de journalisme de Lannion, j’ai pu effectuer plusieurs stages. En PQR mais également en télévision, à TV7 Bordeaux. Expérience très enrichissante puisqu’en télévision locale, j’ai pu effectuer des reportages de A à Z, de la prise d’image, au montage, en passant par la rédaction des commentaires. Puis je suis partie un an à Québec. Cours à l’Université Laval et stages, à Radio Canada, au service télévision. Une licence info-com et un master 1 de science politique en poche, j’ai pu intégrer le master 2 journalisme. Entre temps, deux étés à la Dépêche du Midi à Agen, un autre à Ouest-France, à Nantes, en 2007. J’ai longtemps hésité entre la presse écrite et la télévision. Entre l’écrit et l’image. Si j’ai privilégié l’écrit, le web pourrait me permettre d’allier les deux.