Faut-il boycotter la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Pékin ?

Par le 30 mars 2008

Cette semaine, la rédaction d’Haut Courant s’interroge sur le boycott des J.O de Pékin. Nous vous invitons à poursuivre le débat par la voix de vos commentaires.

Des entorses aux droits de l’Homme jusqu’à l’ignorance des promesses faites au CIO, la liste des reproches adressés à la Chine s’allonge de jour en jour. Pour contrer le manque d’actions par la diffusion médiatique , l’organisation Reporters Sans Frontières a appelé les représentants et chefs d’États au boycott de la cérémonie d’ouverture, le 8 août prochain. Trois membres de RSF, parmi lesquels Robert Ménard ont d’ailleurs perturbé le rite d’allumage de la flamme. En Europe, les avis se partagent sur l’utilité et la portée d’un tel acte. Boycott symbolique, nécessaire ou aggravant ? La décision de laisser un fauteuil vide se prend-t-elle comme un avis politique ?

Boycottage ? Sûrement mieux à faire, par Audrey Montilly

Le Dalaï Lama lui-même s’est prononcé contre le boycottage des Jeux Olympiques de Pékin. Il sait que l’impact serait mineur. Le boycottage des J.O en Russie en 1980 n’a rien changé en ce qui concerne les droits de l’homme dans ce pays.
Cette solution ne serait pas efficace durablement. Et « snober » seulement la cérémonie d’ouverture d’autant plus inutile. Si l’on va plus loin, pourquoi s’arrêter aux J.O de Pékin ? D’autres pays auraient mérité la punition. Les États-Unis ne représentent pas l’exemple de morale humaine. Ceux-là même qui ont lancé le boycottage des J.O en Russie pour protester contre l’intervention militaire soviétique en Afghanistan, transgressent les règles élémentaires du droit international depuis 5 ans en Irak.

Alors peut-on moralement aller à Pékin ? Oui, mais pas en ne restant à rien faire. Organisons là-bas des actions qui révéleraient au monde le rejet du comportement de la Chine à l’égard du Tibet et des droits de l’homme. Que nos sportifs battent tous les records et montent sur le podium portant sur eux des messages. Mais également pendant toute la durée des Jeux. Tout comme les politiques depuis les tribunes. Les télévisions chinoises ne pourront pas tout filtrer.

Deux athlètes américains, militants des Blacks Panthers, ont brandi des gants noirs aux J.O de Mexico en 1968 pour protester contre la ségrégation raciale aux États-Unis. Radiés des Jeux Olympiques, ils l’ont payé cher. Ils ont enfreint la règle de la charte olympique qui interdit d’exprimer toute opinion politique. Cette fois, Romain Mesnil, président du syndicat des athlètes français, propose aux sportifs de porter des rubans verts aux J.O de Pékin, pour montrer leur attachement aux droits de l’homme. Au-delà d’une position politique, il s’agit là d’une position par rapport à des valeurs. Alors un peu de tolérance. Citoyens comme les autres, les athlètes ont le droit de s’exprimer. Cependant il ne peut être question d’initiatives isolées, mais bien d’une incitation collective de la part des instances nationales. Ce n’est pas gagné, mais utilisons ces J.O. La politique de la chaise vide n’a jamais rien apporté.

Face aux Jeux de la discorde, par Ellen Guinéheux

Elle n’a pas tenu ses promesses. A l’heure où les Jeux Olympiques de Pékin doivent consacrer la puissance de la Chine dans le monde, les associations de défense des droits de l’Homme appellent la communauté internationale au boycottage. Face aux violations grandissantes des libertés publiques, le boycott devient plus qu’une plus une simple menace destinée à faire réagir le gouvernement chinois. Il symbolise la volonté de dénoncer un régime d’oppression et de censure banalisés par l’image d’une Chine prospère et florissante. Arme politique régulièrement brandie, le refus collectif de participer au plus grand rassemblement sportif du monde envoie un puissant signal de protestation. Ce moyen de pression a été utilisé de nombreuses fois pour dénoncer le silence volontaire de certains États face à l’étouffement des droits fondamentaux, contre l’apartheid en Afrique du Sud notamment.

L’attribution des Jeux olympiques à Pékin en 2001 impliquait une contrepartie : améliorer la situation des droits de l’Homme et garantir la liberté de l’information. Or, la question actuelle du Tibet témoigne d’une réalité occultée de 60 ans de répression et de sinisation forcée du peuple tibétain. La lutte contre l’occupation chinoise a déjà fait de nombreuses victimes et prisonniers d’opinion. À l’écrasement de la dissidence pacifique des Tibétains s’ajoute une improbable manipulation médiatique : après avoir censurée l’image de la flamme olympique au moment de l’intervention de trois manifestants à Athènes, Pékin demande la retransmission en différé des J.O afin de pouvoir supprimer toute contestation. À partir du moment où la communauté internationale et le comité olympique ont accordé les J.O à Pékin, il faut envisager les options les plus radicales pour permettre une remise en cause du régime communiste chinois. À moins que les intérêts économiques entre l’occident, la Chine et sponsors des J.O soient d’autres freins pour briser le silence des dirigeants mondiaux face à l’opacité chinoise.

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à propos de l'auteur

Auteur : Ellen Guinéheux

J’ai 26 ans et je suis diplômée d’un DEA en sciences sociales. Après un parcours en langues et en économie, ce sont finalement ces deux dernières années de master qui m’ont conforté dans ma destinée journalistique. J’y ai notamment travaillé sur les questions environnementales et j’en ai fait mon cheval de bataille. Maintenant, je m’accroche fermement à cette formation pratique et espère, à moyen terme, agir et faire réagir.