La précarité étudiante : une réalité tabou

Par le 27 mars 2009

Avec un budget moyen de 582 € par mois (dont 190 € pour la nourriture et 131 € pour le logement) la plupart des étudiants ont du mal à boucler les fins de mois. A Montpellier, près de 5 % des inscrits (soit 3 000 sur 60 000) n’auraient même pas les ressources nécessaires pour vivre décemment. Entre gène, pudeur et optimisme, portraits croisés de ces jeunes qui tentent de trouver des solutions pour s’en sortir.

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Manger : « la » préoccupation de tous les jours

Premier poste de dépenses des étudiants, l’alimentation reste « la » préoccupation quotidienne. Une réalité difficile à gérer pour les plus précaires. Néanmoins, entre système D, solidarité et associations de soutien, chacun trouve, à sa manière, un moyen de s’en sortir.

pano-2.jpgLa solution de Teddy, en reprise d’études : le déstockage alimentaire. Il se rend pour la première fois dans un magasin de ce genre à Vendargues. «Ce ne sont pas les produits que j’achète habituellement, mais c’est pratique pour acheter en gros», explique-t-il. Avec ses 500 € mensuels, à partager entre logement et nourriture, «aucun extra évidemment, pas de loisirs ni de sorties». Il compte à l’euro près.

Pour M’baye, un sénégalais de 22 ans en première année d’économie, «le budget pour manger est de 30 € par mois. De quoi acheter un grand sac de riz de 10 kg, mais jamais dans les grandes enseignes. Bien trop chères.» En revanche, il peut appeler ses amis, qui lui viennent en aide en cas de besoin. L’un d’eux, Mustafa, Sénégalais comme M’baye, raconte qu’à son arrivée en France il y a cinq ans, «c’était semoule ramenée du Sénégal avec un peu d’eau chaude». Ce fut son seul repas pendant plusieurs mois. Maintenant, il apporte son soutien à ceux qui arrivent en France comme lui, démunis.

Reste le cas de Brahim et Anouar, étudiants de Master. Tous deux ont été dirigés vers le Secours populaire par les services du Crous. «J’avais prévu un budget pour cette année, mais il est déjà épuisé», explique Brahim. Arrivé d’Algérie au début de l’année, il s’est contenté de vivre avec 15 € par mois pendant près de six mois. «Si je viens au Secours populaire, c’est que je n’ai plus d’autres solutions», avoue-t-il pudiquement. C’est sa première visite.

Anouar, de son côté, aborde sa situation avec philosophie. «De toute façon, c’est la crise». Installé en France depuis deux ans, il a travaillé pour financer ses études mais cette année, «il n’y a plus de boulot». Avec 300 € de budget mensuel, l’aide alimentaire du Secours populaire lui permet d’envisager son quotidien avec plus de sérénité.

Le logement, autre soucis du quotidien

La ville de Montpellier totalise 7 000 logements sur le parc locatif universitaire, pour 60 000 étudiants issus des trois campus. Le loyer moyen d’un studio dans le privé se situe entre 360 €, et 400 €. Des prix onéreux pour la plupart des étudiants qui connaissent parfois des difficultés à se loger.

r1156768294.jpgA 22 ans, M’baye, Sénégalais en première année d’économie, en sait quelque chose. «Je vis avec un ami qui possède une chambre en résidence universitaire. Un petit 18m2 pour deux, c’est mieux que rien.»
Pour un étranger, accéder à un logement universitaire, «c’est la galère». Pas d’accession en « cité U » avant le Master et de nombreux papiers à fournir pour justifier de la solvabilité de l’étudiant : titre de séjour en règle, justificatifs des comptes avec au minimum 472 € de revenus par mois…

Les étudiants étrangers ne sont pas les seuls à pâtir d’une situation financière précaire. Pour Teddy, étudiant français de 27 ans en reprise d’études – il passe un diplôme d’accès aux études universitaires, le quotidien n’est pas simple non plus. «Je suis en fin de droit pour les indemnités chômage.» Il vit en couple, ce qui le sauve. Son propriétaire ne connaît pas sa situation. «Il ne m’aurait pas loué le logement. En plus, je n’ai pas de garants. Mes parents connaissent des difficultés pires que les miennes».

Rencontré également au détour de la fac, Max, un squatteur. «Depuis quelque temps, nous logeons à plusieurs dans un squat. Pour ne pas nous faire expulser le 15 mars, à la fin de la trêve hivernale, nous avons pris un abonnement EDF.» Max s’oppose pourtant à montrer «sa piaule». «Nous préférons rester discrets. On court toujours le risque de voir débarquer les flics.»

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à propos de l'auteur

Auteur : Marion Grenes

Un Master Humanitaire à Aix en Provence en poche et une brève passade aux Pays Bas, direction Montpellier pour le Master Journalisme. Une pause cependant cette année, avec un remplacement de journaliste au Télégramme de Brest. Une révélation pour moi qui souhaitais acquérir des bases dans un métier idéalisé depuis bien longtemps. Mes expériences passées m’ont également permis d’écrire pour le magazine Kinés du Monde et d’exercer au sein du service presse de la Fondation de France. Une activité touche à tout particulièrement formatrice. J’attends du Master un enseignement riche et de belles rencontres, me faire une petite place un jour dans une rédaction où les mots se conjuguent avec déontologie et respect d’autrui.