Le monopole de la gestion de l’eau en France

Par le 25 novembre 2009

La France est confrontée à une problématique nationale bien particulière, qui en fait un cas unique. Deux grandes entreprises, Véolia et Suez, détiennent le monopole de la gestion de l’eau et en tirent de gros bénéfices. A partir de 1954, les entreprises privées accentuent leur emprise sur l’eau et vont progressivement « développer des brevets et des normes techniques qui leur permettront de contrôler tous les maillons de la chaine de gestion de l’eau » nous explique Marc Laimé. La faiblesse des institutions publiques en matière de recherche, d’instruments techniques, de moyens de distributions liée au fait que les entreprises gèrent elles-mêmes le contrôle de leur production en employant avocats et experts divers, a renforcé cette appropriation.

« Les élus locaux sont impuissants face à ces entreprises, ils n’ont pas les moyens de lutter sans ingénierie publique » renchérit Marc Laimé.

Mais, pourrait-on se dire, est-ce vraiment néfaste que de grandes entreprises détiennent ces couteux équipements de gestion de l’eau ?
la propriété commune qu’est l’eau est possédée par des groupes d’intérêts particuliers et ceux-ci tirent d’important bénéfices en achetant des concessions à des collectivités territoriales, comme par exemple les vendeurs d’eau minérales, qui payent des droits pour exploiter des sources et revendre cette eau avec d’énormes plus values. Il semble donc quelque peu inapproprié que des personnes privées puissent accaparer une ressource publique, qui plus est la plus vitale d’entre elle, et fassent des bénéfices en nous donnant un droit d’accès à ce qui nous appartenait déjà, à nous, citoyens, de fait.

Les sommes versées par les entreprises pour avoir le droit d’exploiter l’eau ne sont pas à sous-estimer. Selon Marc Laimé la ville de Toulouse aurait reçu sous le mandat de Pierre Baudis la somme de 475 millions de francs par une des deux grandes entreprises pour avoir le droit d’exploiter l’eau sur ce territoire.

Comprenons que cette somme versée par l’entreprise à la collectivité est certes énorme pour elle mais sera compensée plus tard par les prix que ces entreprises imposeront aux collectivités pour avoir un retour sur leur investissement.

Marc Laimé conclut gravement « Il n’est pas normal que l’État, complètement informé de ces mécanismes, continue à laisser faire […] il y a un monopole de fait, organisé et entretenu par le renouvellement quasi-automatique des contrats qui arrivent à terme. Sans concurrence les citoyens n’ont aucun point de comparaison et aucun pouvoir sur ces entreprises. L’enjeu pour ces collectivités est de se réapproprier ces moyens »

C’est bien ce que désire l’association Eau Secours 34 qui désire ouvrir le débat sur cette privatisation de l’eau. Marc Laimé explique que ce type d’action n’est en rien unique à Montpellier. Plus d’une centaine de communes en France aurait engagé ce même type d’action grâce à des associations de citoyens.

La tendance actuelle des politiques publiques n’étant pas au renforcement des services publics mais plutôt à une privatisation de ceux-ci, il y a fort à parier que cette situation ne changera pas sous cette présidence.

NB : Alors que 1,2 milliards de personnes dans le monde n’ont toujours pas accès à une eau salubre, Marc Laimé rappelle que les Objectifs du Millénaire, pris par l’ONU le 8 septembre 2008, « ne sont pas tenus ».

La volonté internationale d’assurer un accès à une eau potable et bon marché n’a su trouver d’écho réel : Rapport 2009 sur les objectifs du Millénaire

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à propos de l'auteur

Auteur : Jérémy Gauthiot

Master 1 de science politique en poche, Erasmus réussi, stages conventionnés et chaussures bien lacées, je me sentis prêt à m'élancer sur les pentes escarpées de la profession, à gravir les montagnes de sujets à traiter et, pour filer la métaphore, à récolter les fruits de mon travail. Un travail que je considère essentiel et qui permet de participer aux différents débats qui animent notre temps. Si nous avons tous conscience des difficultés que traverse notre métier, je crois que la génération dont je fais partie, partage ce même goût du défi qui veut, modestement, sinon faire un meilleur journalisme qu'avant, tenter au moins, de faire du journalisme autrement.